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Négatif – Message reçu 3 sur 5 – A vous

Les journalistes et les blogueurs pas vraiment sur la même longueur d’ondes… Tu me captes, là?

Je crois que ça ne va pas du tout entre les journalistes et moi. Ça pourrait, pourtant, puisque ça va déjà un peu mieux avec les éditeurs. Ce n’est pas que je me prenne pour le centre du monde des blogs, comme la petite fonctionnaire israélienne persuadée que l’armée chinoise l’a nommée générale, dans la très drôle pièce d’Hanokh Levin, Douce vengeance et autres sketches. Non, mon narcissisme n’en est pas là du tout. Mais quand même, faudrait pas que les feuilles de chou poussent trop Mémé Magda dans les orties bloguesques.

C’est peut-être une forme de consécration que de recevoir, sur son mail de blog, le communiqué de presse des Inrocks? (Allez, avouez… combien sommes-nous à l’avoir reçu? Vingt? Trente? Cinquante? Plus peut-être!). J’aurais préféré trouver le dernier numéro par surprise dans ma boîte aux lettres. Bon sang, je ne pourrai pas cesser de pester contre nos amis journalistes tant qu’ils useront de méthodes aussi frustes. Voilà ce que je reçois : un mail tout coloré (étendard des Inrockuptibles), flashy, moderne, branché, pour me prévenir que le numéro dédié à la rentrée littéraire est sorti. Avec tout un gang de logos téléchargeables aux couleurs du magazine susdit. Croyez-vous que le chargé de communication de ce mailing se soit fendu d’un mot ou deux à mon égard? Du genre : Chère Magda, veuillez trouver ci-joint…? Même un truc pas personnalisé, j’aurais trouvé ça plus correct que cette absence totale d’explications. Mais il est vrai que c’est probablement une stagiaire, payée 300 euros par mois à un poste de CDI, qui m’a balancé cette promo pas très calibrée. Je ne lui jette pas la pierre, je lui tends plutôt la main et un billet de dix euros pour payer sa carte orange…

Le pire, n’est-ce pas, c’est que les bougres ont réussi leur coup. Ils voulaient sans doute, par leur communiqué de presse aussi glacial qu’une poignée de mains dans Bienvenue à Gattaca ou qu’un baiser de R2D2, me demander si je pouvais avoir l’amabilité de relayer l’information sur mon blog. J’aurais de toute façon acheté ce numéro des Inrocks : non seulement je le lis presque toutes les semaines, mais cet opus particulier me semble regorger de bonnes choses. C’est donc tout à fait dommage que nos amis les branchés ne daignent pas traiter la blogosphère avec un peu plus de respect.

Et, oserais-je le dire encore une fois? Ben oui, tiens, un peu mon neveu, que je vais oser : la plus petite d’entre toutes les blogueuses de mode aurait craché sur n’importe quelle marque de fringues, si elle avait reçu d’elle une pub pour un soutif, sans le moindre pourcentage de réduc ou sans le moindre goodies associé à la promo de l’objet. Parce que c’est comme ça. Les blogueurs littéraires parlent de livres, et un roman, c’est immatériel. Nous vivons d’air et de manque d’égards, c’est bien connu. A vrai dire, j’aimerais mieux que les journalistes ne nous demandent rien, plutôt que de s’adresser à nous aussi froidement.

Attention : ne me faites pas dire que je nie la qualité des articles de ce magazine. En dépit de son parisianisme qui peut virer à l’insupportable (mon snobisme en est froissé, c’est vous dire), je trouve qu’il est un des rares à mixer les infos culturelles du moment avec autant d’allant et de talent. J’en profite pour vous signaler que le journaliste Serge Kaganski, membre des Inrocks et plume plus qu’alerte, officie sur un blog culturel pas mal du tout. Comme quoi. C’est peut-être seulement leur service presse qui a un petit problème d’adaptation.

En bas du message reçu sur ma boîte mail, je lis la chose suivante :  » Pour ne plus recevoir ce communiqué de presse, répondre à ce mail en inscrivant « désinscrire » dans l’objet. »

Si je comprends bien, le fait que les blogueurs pourraient à leur tour employer le langage robotique ne les dérange nullement. Mesdames et messieurs des Inrocks, voici tout bêtement ma réponse, en prose normale, à votre glaciale auto-promotion.

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Julie lit « Le blog de Max »

Montpellier, dans l’appartement de Julie, le 2 décembre 2007

Julie, 25 ans, prospectiviste démographe, vit à Montpellier

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Julie et moi nous rencontrâmes en 1999 sur les bancs de la prépa Sciences Po à Paris. Cette indéfectible amitié qui nous liât immédiatement me consuisit hier chez elle, à Montpellier, pour une fumante soupe au potiron mijotée par son amoureux cordon bleu, Christophe. Julie me vanta à plusieurs reprises les mérites d’un livre qu’elle venait de finir. Je dus presque l’attacher au radiateur pour qu’elle accepte cette interview, mais comme vous allez le voir, cela en valut la peine. (Oui, j’ai adopté définitivement, comme vous pouvez le constater, chers lecteurs, l’emploi du passé simple, bien trop peu usité de nos jours, et qui sied à mon snobisme littéraire.)

Qu’est- ce que tu lis?

Le blog de Max, de Max. Max, on ne sait pas qui c’est. C’est un bloggeur (NDLR : Max est un bloggeur qui racontait sa vie de bureau jour par jour avec un humour assez féroce). Ou alors, s’il n’y a pas de nom sur la couverture, c’est parce que c’est un complot du Ministère du travail, qui essaie d’initier, à travers une subtile conception du management de l’entreprise, une nouvelle manière d’optimiser ses agents à fournir une productivité majeure pour la survie des PME, qui sont effectivement en danger, dans le monde très concurrentiel dans lequel nous vivons, où les petits se font manger par les gros.

Cool. Une phrase que tu aimes dans ce livre?

« Aux curieux entêtés, l’estocade est donnée par une carte postale en apparence anodine mais adossée de telle façon que l’oeil désorienté finit immanquablement par tomber dessus. Elle reproduit un tableau de Dali : Jeune vierge autosodomisée par les cornes de sa propre chasteté, 1954. »

Pourquoi ce livre?

Je fais un travail passionnant depuis un an : je suis fonctionnaire. Mon patron s’appelle J$£//!@biiiiiip (Julie bruite une censure avec talent), plus connu sous le nom de « Grand Manitou fou et incompétent ». Désespérée par une situation d’incompétence généralisée, ayant un vrai travail, rentrant dans la vie active de plain pied, de toute ma jeunesse et de toute mon énergie, une collègue m’a offert trois livres pour soigner ma dépression post-déjeuner. Tu sais, tu rentres à deux heures de ta pause déjeuner, tu es lourd, tu es mou, mou, mou, t’es un mollusque, tu mets ton doigt dans une oreille et il ressort par l’autre oreille, tant ton cerveau est mou. Ma collègue m’a donc offert trois bouquins, parmi lesquels Le blog de Max. A l’origine, c’était un vrai blog qui a eu vachement de succès, du coup, l’auteur s’est dit : je vais me faire de la thune en publiant ce blog chez un éditeur bien juteux (NDLR : Robert Laffont).

Et maintenant, qu’en penses-tu, de ce livre?

Ce livre m’a permis d’élaborer un concept en automanagement et conduite de projet en superstructure tout à fait intéressant, qui s’appelle : le détachement. Le détachement au travail, il faut le vivre pour comprendre ce que c’est. L’une de mes principales missions au travail maintenant, c’est de percer ce grand mystère qui habite ma vie et qui est le suivant : à savoir si les gens qui travaillent dans mon service l’ont tous découvert et le pratiquent tous. Moi, je l’ai découvert au bout d’un an, le détachement, et Le blog de Max m’a aidée à le découvrir plus tôt que les autres.

Le livre est hallucinamment bien écrit, d’autant plus pour un truc comme ça (NDLR : un blog, quoi. Merci Julie…). Pour que le gars puisse trouver des formules pareilles, je pense qu’il a dû glander pas mal de temps!

Avoue! Tu l’as lu au bureau?

Non! Je l’ai lu chez moi. Car j’ai découvert dans mon propre bureau d’autres personnes que je soupçonne d’être détachées. Elles traînent dans le couloir, soit physiquement, soit en jetant un oeil, alpaguent quelqu’un et commencent par parler d’un sujet super sérieux pour finir par parler pendant une heure de la pluie ou du beau temps. Ce sont des échanges salvateurs entre collègues de bureau, parce que ça doit faire au moins une heure qu’ils sont sur un tableau Excel ou sur Google, et ils ont envie de se décrasser la mâchoire… du coup, toutes ces rencontres pas du tout fortuites dans les couloirs de mon bureau ont considérablement rallongé mes journées de travail. Je n’ai donc pas eu le temps de lire Le blog de Max au bureau.

Mais cette situation : ne rien foutre au bureau, ne me convient pas. je suis jeune, je suis active, je crois au travail, je crois en l’action publique, je crois en la politique!

Quel est ton livre préféré?

Cent ans de solitude, de Gabriel Garcia Marquez. Mais alors putain, on est loin du Blog de Max, là. C’est des mondes parallèles!

Maintenant, fais-moi une grimace inspirée par ce bouquin!

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Classe…

Et désormais, Julie sera pour moi…

Celle qui n’a pas encore pris conscience qu’elle va se faire détester par la moitié de mes lecteurs si je ne précise pas la chose suivante : Julie a de l’humour, Julie est une bosseuse, Julie aimerait bien en faire plus au bureau – c’est pas de sa faute, si l’Etat français ne donne pas de boulot aux prospectivistes démographes.

Moi, je soupçonne certain(e)s d’entre nous de bloguer au bureau… je me trompe? héhé! ;-) Ah, je ne vise personne, hein…

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